La grossophobie
Chaque début d’année, c’est la même rengaine. Après les fêtes, il faudrait prendre de bonnes résolutions, « faire attention », « perdre les kilos en trop », ou « se reprendre en main » avant l’été. Il faudrait s’inscrire à des programmes miracles, télécharger des applications qui comptent les calories. Mais pour quoi ? Pour nous ? Pour plaire ? Pour rentrer dans des standards inatteignables ?
Quel message envoyons-nous aux enfants et aux jeunes lorsque nous sommes obsédé.e.s par la taille de nos corps ?
Les standards de beauté sont des constructions. Ils évoluent, mais ce qui doit évoluer en priorité, c’est notre regard sur nous-mêmes et sur les autres. Nos enfants ne devraient pas grandir avec la peur de ne pas être « assez » ou « trop » quelque chose.
Alors aujourd’hui, nous allons aborder ici le sujet de la grossophobie et de ses ravages, notamment chez les enfants et les jeunes.
La grossophobie, qu’est ce que c’est ?
La grossophobie désigne les attitudes et comportements discriminatoires envers les personnes perçues comme grosses, obèses ou en surpoids. Elle peut se manifester de manière subtile, par exemple à travers une remarque à table, ou de manière systémique, comme des difficultés à accéder à certains soins.
D’où vient la grossophobie ?
La grossophobie trouve ses origines dans des normes sociales esthétiques qui valorisent la minceur. Elle s’appuie également sur des préjugés selon lesquels les personnes en surpoids seraient paresseuses, et que leur poids serait une conséquence directe de cette prétendue paresse.
Ces normes sont renforcées par un manque criant de diversité dans la représentation des corps, que ce soit dans les médias, les réseaux sociaux ou la mode. Ces industries valorisent souvent certains corps au détriment d’autres, excluant ainsi une grande partie de la population.
Les canons de beauté ne sont pas immuables: ce sont des constructions sociales. Ils évoluent au fil du temps et varient selon les cultures. Par exemple, au Moyen-Âge, la société valorisait les rondeurs, symboles d’opulence, tandis que la minceur évoquait la pauvreté ou la maladie.
Les multiples visages de la grossophobie
La grossophobie prend plusieurs formes :
- Sociale : moqueries, insultes, hostilité…
- Institutionnelle : infrastructures inadaptées (sièges trop petits…)
- ou accès restreint aux soins.
- Interne : honte ou culpabilité ressentie par les personnes grosses…
Elle se manifeste dans de nombreux domaines :
- Les relations personnelles
- L’éducation, notamment dans les cours d’éducation physique et sportive.
- La vie professionnelle, où les préjugés peuvent freiner l’accès à certains postes ou promotions.
- L’accès aux soins, aux vêtements adaptés ou encore à des espaces publics inclusifs.
Il est important de souligner qu’il n’existe pas de « mince-phobie ». Bien que les personnes très minces puissent subir des commentaires désobligeants, leur corpulence n’est pas la cible d’une discrimination systémique.
Les statistiques
Rien de mieux que des chiffres pour comprendre l’ampleur du problème de la grossophobie !
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Les idées reçues sur la grossophobie
Les idées reçues sur les personnes grosses* alimentent la grossophobie. La plupart de ces mythes, nous les avons entendus mille fois, que ce soit à notre sujet ou à propos de nos ami.e.s et aujourd’hui il est essentiel de les déconstruire pour bâtir une société plus inclusive !
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Les conséquences de la grossophobie
La grossophobie n’est pas qu’une question d’idées reçues : elle a des conséquences bien réelles sur la vie des personnes concernées.
Être constamment jugé ou discriminé peut entraîner :
- Une baisse de l’estime de soi.
- Un sentiment de honte ou de culpabilité.
- Du stress, de l’anxiété, voire une dépression.
La grossophobie peut aussi affecter la santé physique avec :
- du stress chronique
- des troubles alimentaires liés aux stigmatisations et moqueries
- de l’isolement social qui impacte indirectement la santé physique.
Les personnes en surpoids hésitent à consulter :
- Diagnostiques biaisés (le personnel médical attribue tout au poids).
- Structures non adaptées (matériel, sièges, etc.).
La grossophobie contribue à la précarisation :
- Le taux de chômage plus élevé chez les personnes grosses.
- Elles sont victime de discrimination à l’embauche et ont moins d’opportunités professionnelles.
A qui profite la grossophobie ?
La grossophobie génère des profits substentiels pour des industries entières. Ces secteurs jouent sur nos insécurités et nos complexes pour nous faire consommer.
PRENONS L’EXEMPLE DE L’INDUSTRIE DES RÉGIMES.
Elle nous vend des solutions rapides, mais inefficaces à long terme. En effet, 95% des régimes échouent à maintenir une perte de poids sur le long terme, selon une étude de l’Université de Yale. Pourtant, cette industrie continue de prospérer, capitalisant sur l’échec: chaque année, elle pousse les consommateurs à revenir pour de nouvelles méthodes « miracles ».
N’oublions pas les marques de compléments alimentaires « magiques ». L’industrie présente ces pilules, substituts et suppléments alimentaires comme des solutions rapides, mais elles n’offrent aucune garantie à long terme. Les experts de santé remettent souvent en question leur efficacité.
En France, le marché de la minceur, incluant les programmes de régime, les compléments alimentaires et les substituts de repas, était estimé à environ 3,8 milliards d’euros en 2019 (source : XERFI).
MAIS LE PLUS FRAPPANT, SURTOUT AU MOIS DE JANVIER, CE SONT LES SALLES DE SPORT ET ENTREPRISES DE FITNESS EN LIGNE.
Elles inondent nos feeds et nos boîtes mail avec des offres alléchantes, liées à nos résolutions de « Nouvelle année, nouveau moi ». En janvier, 12% des Français prennent un abonnement en salle de sport, mais seulement 1 sur 4 le conserve plus de six mois (source : étude IFOP, 2022). Beaucoup de personnes souscrivent souvent à ces abonnements à cause de la pression sociale, mais la plupart abandonnent après quelques mois, bien que les salles de sport continuent de percevoir leurs paiements mensuels. C’est un modèle économique basé sur la culpabilité et la frustration.
En 2022, on estimait le secteur du fitness en France à environ 2,17 milliards d’euros (source : EPISMAS).
PENSONS ÉGALEMENT AUX APPLICATIONS DE SUIVI DE LA SANTÉ ET DE NUTRITION
Elles profitent de l’anxiété liée à notre image corporelle, en montrant des corps idéalisés et en promouvant des transformations physiques comme la seule voie vers l’acceptation sociale. Ils jouent toujours sur notre culpabilité et la promesse d’un « corps parfait » pour vendre leurs services, abonnements et programmes, en nous faisant compter calories et heures de sports.
Le marché mondial des applications de santé mobile était estimé à 37 milliards de dollars en 2020. Il devrait atteindre 149 milliards de dollars d’ici 2028, avec une croissance annuelle moyenne de 18,1 % (sources : Grand View Research et Statista)
ENFIN, LA MÉDECINE ESTHÉTIQUE EST UN SECTEUR EN PLEINE EXPANSION.
En France, c’est un marché estimé à 1,2 milliard d’euros en 2019. Une croissance annuelle de 8% prévue jusqu’en 2025. La grossophobie joue un rôle clé dans cette dynamique, car elle pousse de nombreuses personnes à recourir à des solutions chirurgicales pour se conformer aux standards de beauté véhiculés par la société.
Un enfant ou un adolescent veut faire un régime, que faire ?
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Agir contre la grossophobie
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Les ressources
- Association Gras Politique
- La grosse asso
- Film On achève bien les gros
- Film Grosses : le poids de la réussite
- Livre Moi en double
- Livre On ne nait pas grosse
- Mon gros podcast
- Héroïne décomplexée
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Dans les petits illustrés de l’intimité, nous parlons du corps de façon inclusive, respectueuse et sans tabous. La collection est disponible en librairie et sur notre site Internet ! Le tome 1 traite du corps féminin, le tome 2 du corps masculin, le tome 3 des familles et des conceptions et le tome 4, enfin, s’adresse aux adolescents.
* Dans tous nos posts, nous utilisons le terme « gros.se » manière neutre, simplement pour désigner la corpulence des individus.